Pendant des années, les polémiques autour des cas de triches enflaient après chaque Spartan. Depuis la mise en place de la vidéo, du nouveau corps de marshalls et la nomination de Bruno Matias à la tête de cette équipe formée, la nouvelle politique arbitrale de la discipline en France connait un véritable succès.

Les arbitres savent désormais faire respecter leurs décisions. Les coureurs respectent mieux les consignes et acceptent plus facilement les choix faits. Pour arriver à cela, une période d’une réelle intransigeance était nécessaire.

Ce week-end, à Jabelines, David Labrosse et Jérémie Gachet ont été tous deux disqualifiés par décision arbitrale. Les deux athlètes ont accepté ces choix d’une façon exemplaire sans créer de polémique et sans scandale.

Il est indispensable de préciser que les décisions de Spartan ne peuvent souffrir d’aucune accusation de collusion et de copinage. Les choix ont été faits à moment donné, dans un contexte précis qui ne permet ni la contestation, ni de revenir en arrière. Le caractère irréprochable de l’arbitrage et l’exemplarité constante depuis le début de leur carrière en courses à obstacles de deux coureurs : David et Jérémie, permettent de revenir sereinement sur ces deux décisions et, à mon sens, de faire avancer la discipline.

Jérémie Gachet et le rig final

Avec un rig modifié, Jérémie est disqualifié pour avoir attrapé un autre élément de la structure du rig final. Si la décision est pleinement compréhensible. L’athlète a, par ailleurs, accepté la décision d’arbitrage. La discussion porte ici sur la notion d’appui et le rôle du marshall sur l’obstacle car concrètement, les arbitres n’ont pas signalé à Jérémie l’échec de l’épreuve et la nécessité de se diriger vers la zone de pénalité.

Il a été considéré qu’attraper l’obstacle sans prendre appui est considéré comme une tricherie entrainant la disqualification a posteriori, c’est à dire en revenant sur la décision (ou la non-décision) des marshalls présents sur l’obstacle. En faisant le choix de sortir Jérémie Gachet du classement, Spartan est revenu sur le jugement (ou l’absence de jugement si ceux-ci ne regardaient pas la scène) des arbitres diminuant leur rôle réel en course : la vidéo est plus supérieure au jugement de l’arbitre sur l’obstacle.

Cela peut être tout à fait justifié dans un cas de triche volontaire. Mais dans le cas d’une erreur auto-corrigée ayant entrainé une perte de temps à l’athlète, la décision de la disqualification peut sembler disproportionnée. Elle était pourtant nécessaire dans un temps où les triches à répétition étaient la coutume. Cette impression de sévérité, nous la devons grandement à un travail de fond nécessaire et bien réalisé par les arbitres de Spartan.

En attendant un assouplissement des arbitrages au niveau de la sanction (pénalité temporaire plutôt que disqualification), il est donc nécessaire pour les athlètes s’élançant dans les Spartan Race de ne pas prendre en compte les jugements des arbitres mais de se diriger d’eux-même vers la zone de pénalité en cas de doute. Sur le papier, cette demande semble tout à fait raisonnable, pourtant l’impact psychologique de la compétition modifie l’ensemble des repères et la rend réellement complexe à appliquer.

David Labrosse et la tyrolienne

3 heures après les résultats et sur réclamation d’un athlète avec preuve vidéo à l’appui, David Labrosse est disqualifié. La raison : il aurait touché le sol lors de la traversée de corde. Sur le papier, la décision semble parfaitement compréhensible. Une semaine avant, le champion Eugenio Bianchi a été disqualifié sur une Spartan pour un problème similaire. Toutefois, plusieurs détails viennent offrir une autre lecture.

Le premier se trouve dans le traitement de la vidéo : sur les images live, David glisse de la corde, se rattrape et reprend son parcours. Le contact avec le sol, probablement postérieur, semble évident au premier visionnage. Pourtant, le gainage de l’athlète et la modification du centre de gravité de la corde indique un transfert de la force vers les bras permettent un doute raisonnable. La surface au sol, de l’herbe, permet d’avoir également les quelques centimètres de hauteur qui font que l’athlète ne sentira pas le contact avec celle-ci d’autant plus que sa concentration sera portée sur son sauvetage.

Sans marshall sur l’obstacle, avec uniquement des bénévoles pour la sécurité, la décision revient à du parole contre parole. Dans le contexte de la course, l’impression de contact sur la vidéo – mon impression est différente à la vue des images, je suis néanmoins confortablement installé pour revoir de multiples fois les images avec toute la qualité nécessaire – et la réclamation de l’athlète ont suffi à déterminer un niveau suffisant de volonté de tricher de David Labrosse, le même athlète qui a cédé sa sélection dans l’équipe de France aux Spartan 2017 car il estimait que son niveau n’était pas suffisant pour porter les couleurs françaises. À la différence d’Eugénio Bianchi la semaine précédente, on ne voit clairement aucune intention de tricher si jamais contact il y a eu.

Et après ?

Pour Jérémie comme David, la décision est tombée après. Et elle a une nature profondément injuste : ils ont fait leur course, ont eu l’impression de réaliser une performance impeccable et pourtant une erreur dont ils n’ont pas tirer avantage les disqualifie complètement.

Cette exemplarité dans la sanction a été salvatrice pour notre discipline, elle a été indispensable et je remercie, une nouvelle fois, les équipes d’arbitrage pour leur travail immense cette année. Pour le sport, sa diffusion et son développement, j’estime qu’il est désormais temps de revenir à des méthodes d’arbitrage plus équilibrée où la disqualification n’est pas la seule sanction et où la réponse peut être graduée en fonction de l’intention de tricher.