Étudiant en Ecole de Commerce, Thibaut a découvert la course à obstacles en 2014. Résidant actuellement au Royaume-Uni, il en profite pour participer des courses à obstacles non présentes en France et faire partager ses expériences.
Dimanche 27 janvier, s’est déroulée la dernière édition de la Tough Guy. Cette course mythique crée par Mr Mouse en 1987 a su mettre à l’épreuve pendant 30 ans des milliers de coureurs. Résidant depuis peu au Royaume-Uni, j’ai décidé de me rendre à Wolverhampton pour me mesurer à cette course. Une hypothermie aura eu raison de moi avant l’arrivée, lorsqu’un Marshall a pris la décision de me faire arrêter.
Le départ étant initialement prévu à 11h, je décide de me rendre sur place à 9h pour récupérer mon dossard et profiter de l’ambiance. Malheureusement, les premières complications apparaissent avant même d’arriver aux parkings. Un bouchon de 1h s’est formé dans l’unique voie d’accès aux parkings. L’heure du départ approchant dangereusement, je décide de me changer dans la voiture et d’avaler en vitesse ma préparation glucidique et ma collation pré-course. J’arrive à me garer tant bien que mal aux alentours de 10H15. Je file au poste “Registration”. 45 minutes plus tard j’ai récupéré mon dossard, signé ma death warrant certifiant que je sais que je peux me blesser ou mourir durant cette course, je dépose mon sac et je me rends dans la zone de départ.
A Tough Guy, tous les participants (7000 cette année) partent en même temps, nous sommes séparés en plusieurs sections : Les Présidents, Front squat, Vétérans, Red Squad et les Wednecks (les petits nouveaux) qui commencent la course à l’arrière.
Tough Guy est divisée en deux parties : Le Country Miles qui est plus axé sur la course à pied tout en comportant un nombre important d’obstacles, et le Killing Field où vous ne ferez pas plus de 50m de course sans rencontrer un obstacle d’eau ou de boue.
Il est 12h00 et le canon retentit enfin ! Tous les coureurs s’élancent sous les applaudissements et à travers les fumigènes et se dirigent vers le Country Miles.
Je décide d’accélérer progressivement sur la première partie de la course pour aller à l’avant du peloton et éviter les bouchons qui se formeront sur les obstacles.
Nous traversons un champ sur un chemin en zig zag jalonné de bottes de pailles à escalader, puis arrivons-en bas du Slalom de la colline. Il s’agit d’atteindre le sommet de la colline et de la redescendre 7 fois d’affilée. Les branches d’arbres sont basses, le dénivelé est raide, heureusement pour moi mes Inov X-Claw adhérent bien ! Les cuisses chauffent sur cet obstacle, mais le cardio reste stable, sur la dernière descente je croise deux français.
Après un premier point de ravitaillement en eau, j’arrive sur le premier obstacle d’eau : 4 tranchées à traverser avant de finir par un passage dans une mare. L’eau arrive au nombril, elle est fraîche mais cela reste supportable. Je décider de ré accélérer un peu en sortant de l’eau histoire de sécher plus rapidement. Après une longue partie de course à pied nous arrivons dans les bois Big Bear Wood.
Nous commençons par courir dans un ruisseau boueux, et là, premier bouchon. Cela se reproduira à plusieurs reprises durant la course et sur le Killing Field, ces moments d’attentes dans le froid auront plus d’impact sur le corps.
Les Big Bear Wood sont jalonnés de filets sous lesquels il faut ramper et de murs à escalader. A la sortie des bois, se trouve le deuxième ravitaillement.
Nous arrivons ensuite sur l’obstacle qui m’aura le plus marqué : le Water Slalom. Il s’agit de 7 tranchées côte à côte, remplies d’eau et de boue qu’il faut franchir successivement. Les tranchées sont à chaque fois de plus en plus remplies et de plus en plus escarpées. Il m’aura marqué par sa difficulté physique et psychologique, en effet l’obstacle semblait interminable. La pluie s’est pointée à la dernière remontée comme pour nous signifier que désormais nous ne serions plus jamais au sec.
Nous quittons ce slalom aquatique, nous passons dans plusieurs points à la profondeur croissante, et nous arrivons sur les premières structures de cette course.
Il faut escalader une échelle de planche et redescendre par un filet, passer au milieu des fils électriques et attaquer le même obstacle. Après, nous enchaînons sur plusieurs fossés à franchir et un passage de course dans l’eau.
Nous sommes maintenant dans le Killing Field, nous avons parcouru 10km avec plus d’obstacles que dans n’importe quelle course que j’avais couru jusqu’à lors. Le plus dur reste à venir, car dans le Killing Field, il ne s’agit plus de course mais uniquement d’obstacles : Des structures, des ponts de singes, des rampés, des fossés à franchir et de l’eau et toujours de l’eau.
C’est vers cette partie de la course que je croise un autre Français : Sébastien de Bordeaux ! On a continué une bonne partie de la course ensemble en s’encourageant : solidarité française oblige ! Je ne l’ai pas revu, mais j’espère qu’il a pu finir !
On arrive sur le Colditz Walls : Une cuve immense remplie de boue collante arrivant aux genoux, dans laquelle il faut monter et redescendre la pente plusieurs fois. Dans cet obstacle, l’entraide est primordiale car chaque pas est difficile à cause de la boue. Je remercie d’ailleurs ces coureurs qui m’ont aidé à me relever alors que j’avais trébuché, se mettant eux même en difficulté.
On enchaîne ensuite sur Behemot, une structure qu’il faut atteindre avec des filets et composée de 3 ponts de singes. Un rapide passage au-dessus de quelques petites flammes et on attaque la « Bataille de la Somme » qui alterne passages dans l’eau et franchissements d’obstacles. Le froid est bel et bien là, je ne ressens plus mes pieds.
Après plusieurs franchissements de tunnels et d’obstacles divers, nous arrivons à un symbole de Tough Guy : Les Vietcongs Tunnels. C’est un enchaînement de tunnels plongés dans le noir, l’eau et la boue et surtout des gros morceaux de bois qui pendent et qui vous cognent quand ils sont poussés par vos compagnons de course.
L’obstacle suivant est une grande structure à escalader, et à redescendre avec une corde : Gare aux chutes ! A ce moment de la course, je commence à ne plus ressentir mes doigts, et je respire de plus en plus fort. J’essaie de me calmer en prenant de grandes inspirations.
Je parcours quelques dizaines de mètres de course et là bouchon de quelques minutes. Avec le froid et mes vêtements trempés cela parait très long. Surtout que l’obstacle qui suit nous mets à rude épreuve, il faut rentrer dans l’eau glacée, nager quelques mètres jusqu’à une structure et s’immerger totalement dans l’eau en passant sa tête dans 3 trous successifs. Nous avions le droit de passer des obstacles, je n’ai pas voulu l’éviter me disant qu’il s’agissait d’une des épreuves faisant la renommée de Tough Guy.
Une fois sortie de l’eau (Très fraîche, le premier Jon Albon a dû briser la glace pour y rentrer selon ses dire), je me jette sur le Branderberg Wall une structure à escalader et à redescendre en roulant dans un filet tendu.
On poursuit notre chemin, et là nous attends le Death Plunge, où nous devons plonger dans une étendue d’eau et rejoindre le bord. Je suis affecté par les deux obstacles, ma respiration devient très rapide et j’ai froid au torse.
Le Dragon Kiss arrive, il s’agit tout simplement d’un pont de singe traversant une étendue d’eau. N’ayant pas du tout envie de retourner dans l’eau, je m’accroche et le franchis sans chuter. Néanmoins, je n’arrive pas à me réchauffer, et le froid m’affecte de plus en plus.
On arrive au dernier ravitaillement d’eau, et j’arrive sur ce qui sera mon dernier obstacle, des monkeys bars au-dessus de l’eau. Deux coureurs m’interpellent s’inquiétant de mon état, et voyant que j’ai de la peine à répondre, alertent un Marshal pour qu’il juge mon état. Celui-ci estime que je me mets en danger et prends la décision de m’évacuer de la course. Il ne me restait plus que 6 obstacles à franchir.
On me fait grimper dans une voiture et on m’amène dans une pièce chauffée en me fournissant une couverture. Je rejoins les finishers, ou ceux qui ont dû abandonner comme moi. Une heure après, j’ai l’autorisation des équipes de secours de partir. Je récupère mes affaires, prends une douche chaude et rejoins ma voiture.
J’ai la chance contrairement à d’autres de ne pas m’être embourbé et je peux quitter Wolverhampton après avoir passé 1h dans les bouchons, heureux d’avoir vécu cette expérience mais rempli de regrets.
Un coureur avait décrit cette course comme « Mike Tyson te frappant jusqu’à que ce que tu tombes à terre et ne te relèves plus ». Cela peut paraître exagéré, mais en toute honnêteté, cela correspond au ressenti que l’on a dans le Killing Field. Cette course n’a pas volé sa réputation d’être une des plus dures du monde.
Je pense pour ma part avoir commis plusieurs erreurs, notamment celle ne pas m’être assez couvert et de pas avoir mangé pendant toute la course.
Tough Guy the Original, c’est fini! Mais Mr Mouse n’a pas dit son dernier mot…
Sur le site viennent d’apparaître deux nouvelles courses : 15km en Avril « Mr Mouse Mudathon » et un 21 km en juillet baptisée « World’s Toughest Orunner Championships » où l’équipe promet des nouveaux obstacles impossibles à franchir.
Pour moi, la prochaine étape c’est l’Avalanche Run qui aura lieu le 25 février prochain, et une préparation rigoureuse avant de retourner sur le terrain de Mr Mouse le 30 avril !
Je tiens à remercier les équipes de secours pour leur efficacité, les deux coureurs qui ont signalé mon état pour leur vigilance, Sébastien de Bordeaux pour les encouragements, et Mr Mouse et l’équipe Tough Guy pour cette journée qui restera gravée.
http://obstacle.fr/the-last-ever-tough-guy-par-nicolas-pascaud/
Salut Thibault,
C’est Sebastien de Bordeaux, j’espère que tu vas mieux, j’ai réussi à finir en 3h54. Ça a été un plaisir de partager ce moment avec toi 🙂
Mon ami Nicolas a écrit lui aussi un article sur notre parcours vers l’enfer de Mr Mouse. Tu le trouvera sur obstacle.fr
Bonne continuation, et n’oublies de m’avertir quand tu trouvera une course encore plus dure !
Salut Seb! On remet le couvert en février prochain sur la nouvelle course de Mr Mouse ? 😉
Avec plaisir !